Artisanat  ·  04 décembre 2015, 16:15

Le compas dans l’œil

©Loup Godé

Une belle fin d’après-midi en Meuse dans l’atelier Les Meubles de Mon Grand Père. Christophe Rimlinger accueille, souriant, tout en continuant d’empiler les pieds de tabouret en cours d’assemblage qu’il vient de terminer. Ils vont par trois, et attendent pour le lendemain leur belle assise en rondin de chêne avec son écorce.

« Ces plateaux là-bas sont trop grands, et trop ronds, trop réguliers. Je vais aller les choisir moi-même demain. »

Il déplace rapidement le meuble à roulettes qui soutient le petit échafaudage, invite dans son bureau à l’étage et propose un vrai thé. En revenant sur l’origine de sa vocation dans le métier du bois, il se souvient : « Mon père faisait des bricoles avec une scie à ruban et une dégauchisseuse, mais pas des meubles. Il y avait des menuisiers dans le village, et j’allais les voir.» Né en 1967 à Saint-Mihiel de parents agriculteurs, il installe son atelier à Villotte-sur-Aire en 1992, après les quatre ans de travail qui ont suivi sa formation en ébénisterie et en agencement. C’est surtout partir d’un dessin et d’une matière brute pour aboutir à une pièce finale originale qui l’intéresse. « Un projet, ça se dessine toujours avec le client, on essaie de comprendre ce qu’il veut. » Qu’ils viennent des environs, d’Allemagne ou de Saint-Remy de Provence par le bouche à oreille, les particuliers rêvent de meubles de salle à manger, de cuisine, de salle de bain, de dressings, aux lignes très contemporaines ; les magasins et les boutiques, d’agencements complexes sur mesure, de grande dimension. C’est un cachet particulier que Christophe sait leur apporter, par sa maitrise du mélange des essences indigènes -chêne, frêne, érable- avec le médium laqué, du plaquage à la feuille d’argent ou même de l’usinage du Corian, une résine minérale avec laquelle « on peut faire des choses rigolotes ».

Certaines pièces sont spectaculaires, comme cette bibliothèque circulaire de deux mètres de haut qui lui a demandé près de cent heures de travail. En 2010, pour l’aménagement intérieur et le mobilier du Nichoir, une Maison Sylvestre conçue par matali crasset à Vent des Forêts, il choisit le frêne et réalise les étagères, les coffres, les assises. Il fabrique ensuite la table et les premiers petits tabourets en chêne de la deuxième maison, la Noisette, qu’il reproduit actuellement. Une façon de prolonger cette heureuse collaboration : « C’est un beau complément et c’est fantastique de travailler avec des personnes extérieures, avec un savoir qu’elles partagent. » C’est lors d’un projet mené par la designer dans une école du village de Pierrefitte-sur-Aire qu’il reçoit une classe d’enfants à laquelle il fait découvrir son métier. Epatés, ils suivent toutes les étapes de la réalisation d’une petite table qu’ils ont dessinée, et qui est fabriquée devant eux : « c’est amusant de les voir devant la machine, ils ont les yeux gros comme ça. C’est super agréable à voir, et ça va vite pour faire des choses simples, usiner deux trois bouts de bois. » Le portable sonne sur l’air de Trouble sans même faire sursauter Frimousse le chat. Il faut réagir, s’adapter aux clients, se déplacer parfois plusieurs fois pour finaliser un dessin, et être polyvalent. Une restauration, un escalier ou un parquet, Christophe assure : « on sait faire ». Bras croisés derrière la tête, il conclut sereinement avant d’accueillir les clients qui arrivent juste à l’heure :

« C’est un métier où il faut être passionné. La création, l’innovation… fabriquer quelque chose que les autres ne font pas. »

©Loup Godé

©Loup Godé

©Loup Godé

©Loup Godé

Objets We trust in wood par matali crasset réalisés par l’artisan Christophe Rimlinger (Villotte-sur-Aire, 55) :

Tabourets en chêne
Ø 40 cm x H 42 cm

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