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Endri Dani a passé l’été à Vent des Forêts, en résidence chez l’habitant, pour travailler une œuvre mêlant installation et vidéo. Il est né et a grandi dans la ville de Shkodra, en Albanie, avant de rejoindre, adolescent, la capitale, Tirana. Il y a suivi une formation de peintre qui, de son propre aveu, continue d’influer sur ses travaux dans différents médiums. Ce n’est finalement que durant sa première visite en septembre 2016 à Vent des Forêts, et au long des deux mois de résidence à l’été 2017, qu’il a pu découvrir le monde rural et c’est cette reconnexion avec la nature qui a guidé son projet.
Endri Dani s’inspire du travail du sociologue et historien américain Richard Sennett, notamment dans son ouvrage Ensemble. Pour une éthique de la coopération (Together : The Rituals, Pleasures and Politics of Cooperation, 2012). Il s’est surtout focalisé sur le lien entre la terre et les mains de celles et ceux qui la travaillent et l’aspect rituel qui en découle.
La démarche d’Endri Dani est de mettre en scène ce qui, dans le travail de la terre, est resté immuable. Avec le temps, la mécanisation a pris une grande part dans le travail agricole. Les outils ont évolué, leur ergonomie aussi. Ils sont plus efficaces et marquent moins les corps qui les emploient. Mais il est un geste qui a traversé le temps, dont on n’a eu aucune raison de se défaire : le geste simple, rituel, de se laver les mains après le labeur. Un moment de rupture, de passage d’un temps à un autre, qui marque le travail accompli. Il n’est, d’ailleurs, pas anodin de voir que de nombreuses religions et croyances ont intégré ce geste millénaire dans leurs cérémonies.
Loin de l’univers urbain qui a toujours fait partie de son quotidien, de l’immeuble en préfabriqué dans lequel il a grandi aux rues de Tirana, c’est sur celles et ceux qui travaillent la terre, dans de petites exploitations, qu’Endri Dani a posé son regard. Il a découvert le fonctionnement de ce travail avec la nature, mais également les questionnements de l’agriculture actuelle quant aux problèmes écologiques, sur ses connexions avec les changements climatiques et sur la rupture entre l’ancienne et la nouvelle génération d’agriculteurs.
Il a observé le travail se faire, celui où la main est encore en contact direct avec la terre, puis, dans une démarche presque scientifique, il a mis en place un protocole invitant les agriculteurs à se laver les mains au-dessus d’une vasque d’aluminium, leur versant, pour ce faire, de l’eau claire à l’aide d’un broc. L’eau terreuse est ensuite mise dans un bocal, accompagnée d’un papier où sont renseignés les noms, prénoms, âges et professions de ceux qui ont fourni ces échantillons et de leurs parents. Il y a là la trace d’un moment, mais aussi d’une filiation de savoirs et d’apprentissages auprès des aînés.
Les échantillons décantent, la matière se dépose au fond des bocaux et l’artiste les assèche pour n’en récupérer que la terre. Le fait que ce processus crée un paysage miniature, rappel de celui des mains accidentées qui en sont à l’origine, est également très important pour Endri Dani.
A cela s’ajoute la réalisation d’un document vidéo qui le présente tel un arpenteur des chemins, un témoin de ce travail de la main, un collecteur de cette terre. La mise en scène de l’installation, comme celle du film, lient intimement l’approche humaniste et celle quasi-scientifique du protocole instauré par l’artiste.
Un travail qui sera à découvrir bientôt.
Endri Dani est né en 1987 à Shkodra (Albanie), il vit et travaille à Tirana (Albanie).
L’œuvre est réalisée avec l’aide des bénévoles de Vent des Forêts.
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